Dans les années cinquante, sur la côte Adriatique, en Yougoslavie, le jeune Anton voit ses rêves de piraterie alimentés par l'histoire du Pirate Sans Nom qu'un ivrogne lui raconte chaque soir en échange d'alcool. Personnage aussi exceptionnel que mystérieux, il aurait accumulé un fabuleux trésor, si tant est qu'il ait réellement existé. Car entre la réalité et l'imagination débordante de l'Ivrogne il est bien difficile de faire la part des choses. Pour autant, le Pirate Sans Nom marque à jamais la vie d'Anton, et cinquante ans plus tard, devenu le commandant Petrack, un pilleur d'épaves bien connu, en d'autres termes un pirate des temps modernes, sa quête du Pirate Sans Nom et de son trésor n'est toujours pas achevée...
Telle est l'intrigue du Vaisseau ardent, premier roman de Jean-Claude MARGUERITE. Ecrite sur une période de dix-huit ans, l'oeuvre est déjà monumentale pour sa durée de gestation. Elle l'est aussi pour sa taille, près de 1 300 pages et un bon kilo et demi. Elle l'est aussi pour son propos, qui va bien au-delà du simple roman d'aventure et de piraterie. L'auteur se joue en effet du temps et de l'espace ; de l'époque contemporaine il remonte les siècles et ne se contente pas de s'arrêter dans les Caraïbes au XVIIème siècle ; il nous mène aussi au Groenland à l'époque des Vikings et dans l'Egypte prépharaonique ; MARGUERITE réécrit même les mythes de l'Arche de Noé et de la Fontaine de Jouvence.
Les liens entre toutes ces histoires dans la grande histoire sont ténus mais bel et bien réels. Leur détection et leur compréhension nécessite bien sûr une lecture attentive, laquelle est facilitée par une belle écriture, parfaitement travaillée sans jamais être pompeuse. Comme il se doit, les références littéraires sont innombrables, de L'île au trésor de STEVENSON, au Peter Pan de BARRIE. Tout cela fait du Vaisseau ardent un véritable puzzle littéraire, un jeu de piste dans lequel le fil rouge n'est rien de moins que la nature même du trésor du Pirate Sans Nom, laquelle pourrait bien être plus proche d'un mythe fondateur que d'une accumulation de biens matériels.
Le Vaisseau ardent est donc un roman d'une richesse exceptionnelle. On pourra bien sûr lui reprocher un rythme un peu lent et de nombreuses longueurs, mais Jean-Claude MARGUERITE les pallie par une structuration parfaite de son récit et une grande profondeur dans son propos ; c'est pour cela que le roman enthousiasmera à coup sûr les nombreux amateurs de La forêt des mythagos de Robert HOLDSTOCK. Quant aux autres lecteurs ils ont là l'occasion de découvrir, un an après Le Déchronologue de Stéphane BEAUVERGER, une autre manière d'aborder, et de renouveler, le thème de la piraterie, laquelle s'avère particulièrement originale.
Il est possible de lire un large extrait de ce roman en suivant ce lien.