A Seattle, dans les années 1990, un assassin rôde et tue des hommes blancs au hasard avant de les scalper et de déposer deux plumes de hibou sur leur cadavre. C'est alors la terreur dans la métropole et toute la communauté indienne est désignée à la vindicte générale, ce qui n'est pas sans relancer le spectre du racisme.
Dans un tel contexte, Sherman ALEXIE met en scène une galerie de personnages représentatifs de la société américaine contemporaine dans son rapport à la question indienne. Ce sont les indiens eux-mêmes bien sûr, lesquels errent généralement dans le bas de l'échelle sociale et s'autodétruisent à l'alcool. Ce sont les « amis » des indiens ensuite, ceux qui s'identifient à eux en revendiquant éventuellement une ascendance, mais qui ne sont acceptés par aucune des deux parties. Ce sont les blancs enfin, lesquels méprisent toute différence et sont les premiers à se battre face à la moindre adversité supposée.
Plus qu'un roman noir, Indian Killer se veut donc un roman sociologique pointant du doigt une société minée par la discrimination. Ce faisant son auteur s'interroge sur la condition humaine, l'identité des uns et la haine que la précédente peut générer dans l'esprit des autres. Sur la base d'une prose aussi poétique que violente, ALEXIE crée ainsi une oeuvre hybride dont la première des qualités est celle du réalisme social.
Le roman est à ce titre une grande réussite, d'autant que Sheman ALEXIE, bien que lui-même d'origine amérindienne, évite l'écueil du manichéisme en montrant aussi bien les excès de la communauté blanche que ceux de la communauté indienne. Il a en outre le bon goût de mêler habilement réalité sociale et cosmogonie, ce qui ajoute encore à l'intérêt de son oeuvre.