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Robert Poinsot est seul et survit tant bien que mal dans une grotte du massif alpin. Se considérant comme l'un des derniers humains il décide de coucher par écrit son histoire, qui recouvre celle de l'humanité toute entière, et qui la conduit à sa disparition pure et simple, et en un temps record, à partir de 2022...

Le facteur déclencheur est une crise économique mondiale. Phénomène connu depuis le milieu du XXème siècle, les hommes le déplorent mais font contre mauvaise fortune bon coeur, le sachant cyclique et donc, par définition, temporaire. Mais en 2022 les événements s'enchaînent à une vitesse folle précipitant l'humanité à sa perte. Ce sont d'abord les salaires qui ne sont plus versés, puis tout le système productif qui se grippe ; la pénurie conduit alors les hommes à retourner à leur état originel, celui dans lequel ils ne sont guère plus que des mammifères mus par leur désir de survie, et dont l'organisation sociale est structurée autour d'un équilibre proies - prédateurs. C'est ainsi que les gangs ne tardent pas à se former, détruisant à jamais les derniers vestiges d'une civilisation à la technologie avancée mais dépendante de sources énergétiques précaires. Ainsi, sans pétrole, les armées et autres forces de l'ordre sont neutralisées puisqu'immobilisées ; de même, sans électricité, les moyens de communication ne tardent pas à être coupés, sans même parler des conséquences sur le quotidien de l'homme du XXIème siècle.

Ancien chercheur, Robert Poinsot est doté d'une prose à l'avenant, à savoir une écriture factuelle qui, dans sa progression, se veut une démonstration du pourquoi et du comment de la déliquescence de l'humanité. En faisant des allers et retours entre le passé récent et son présent il arrive peu à peu à exposer la thèse qui donne son titre au roman et qui suggère que c'est tout simplement l'humanité qui est arrivée en fin de cycle, et que plutôt que de repartir sur des bases assainies, elle laisserait la place à une autre forme de vie. En d'autres termes il propose une solution au Paradoxe de Fermi qui s'énonce traditionnellement comme suit :

« S’il y avait des civilisations extraterrestres, leurs représentants devraient être déjà chez nous. Où sont-ils donc ? »

Le roman de Jean-Pierre BOUDINE s'inscrit donc dans la pure tradition du roman post-apocalyptique. Genre éculé s'il en est, ici il se démarque par son caractère quasiment anthropologique. Il est vrai que l'auteur est mathématicien avant d'être romancier et qu'à ce titre il propose au lecteur une vision didactique de ce que pourrait être l'ultime crise systémique. En cela ce qu'il écrit est glaçant puisque hautement crédible et proche de notre quotidien. En contrepartie d'aucuns regretteront la quasi absence de dimension romanesque dans le récit, et donc une relative froideur dans le ton.

Notons enfin que Le paradoxe de Fermi a été initialement édité en 2002 aux éditions ALEAS et que pour la présente édition en Lunes d'Encre l'auteur a eu l'occasion d'actualiser son texte. De fait il colle parfaitement à notre actualité économique et politique, ce qui lui donne une force indéniable.

CITRIQ

Le Paradoxe de Fermi - Jean-Pierre BOUDINE (2015), illustration de Aurélien POLICE, Denoël collection Lunes d'Encre, 2015, 192 pages

Le Paradoxe de Fermi - Jean-Pierre BOUDINE (2015), illustration de Aurélien POLICE, Denoël collection Lunes d'Encre, 2015, 192 pages

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