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Je l'ai souhaité en conclusion de ma chronique sur la première publication française de Jo WALTON, Denoël m'exauce en poursuivant la publication de ses oeuvres. Prévenons toutefois les nombreux lecteurs tombés sous le charme de Morwenna, Le cercle de Farthing n'a strictement rien à voir avec la Fantasy subtile et personnelle du premier roman français de l'auteure.

Le cercle de Farthing est en effet un mixte de whodunit et d'uchronie ; on y trouve ainsi pêle-mêle l'atmosphère si particulière des classiques de la littérature policière, tels ceux d'Agatha CHRISTIE, et la dimension spéculative d'un récit construit à partir d'un point de divergence historique. Ce dernier s'est produit en 1941 ; cette année-là une « paix dans l'honneur » a été signée entre l'Allemagne et l'Angleterre, permettant à la première d'imposer le nazisme à toute l'Europe occidentale et de concentrer son effort militaire sur le front de l'Est, installant la seconde dans une neutralité bienveillante à l'égard d'Hitler et ses séides, notamment en termes de politique à l'égard des juifs.

Huit ans plus tard les lords anglais à l'origine du traité de paix se réunissent avec leurs familles dans le manoir du domaine Eversley le temps d'un week-end. Là, les alliances, inimitiés et autres histoires d'amour plus ou moins licites adoptent un visage conforme au rang des protagonistes, celui d'une noblesse imbue d'elle-même, méprisante à l'égard des autres et avide de pouvoir ; dans un tel cercle, rien ne se dit ouvertement, tout se fait sous le manteau, y compris l'assassinat de Sir James Thirkie, principal artisan de la paix avec Hitler ; plus encore, on n'hésite pas à maquiller le meurtre de manière à désigner coupable l'époux de Lucy Eversley, considéré comme un parvenu non pas parce qu'il n'est qu'un simple banquier mais parce qu'il est juif. En cette année 1949 divergente, une telle confession n'est certes pas en Angleterre un motif d'enfermement en camp de concentration, mais ce n'est certainement pas non plus un gage de fréquentabilité.

En fait, seuls Lucy Kahn, née Eversley, et Peter Antony Carmichael, le policier chargé de l'enquête, sont convaincus que les apparences sont trompeuses. Chacun à sa façon recherche le véritable coupable, la première dans un cadre familial élargi, le second à l'extérieur de ce cercle, puisque soupçonnant très vite que ce crime a une dimension politique bien plus vaste qu'il n'y paraît de prime abord. Ce sont ces deux voix qui structurent le roman de Jo WALTON ; celle de Lucy apporte de la légèreté avec un humour très « british », celle de Carmichael donne au récit une dimension bien plus noire puisque démontrant pas à pas que le mobile de l'assassinat n'est ni plus ni moins que l'inoculation de la peste brune dans une Albion pas encore totalement perfide.

L'ensemble fait du Cercle de Farthing une lecture extrêmement plaisante. Elle installe un décor et une ambiance tout en posant de nombreuses questions sans apporter toutes les réponses. Car ce roman n'est que le premier tome d'une trilogie, intitulée Le subtil changement, dont on lira certainement avec tout autant de plaisir le prochain volume.

CITRIQ

Le Cercle de Farthing - Jo WALTON (Farthing, 2006), traduction de Luc CARISSIMO, Denoël collection Lunes d'Encre, 2015, 352 pages

Le Cercle de Farthing - Jo WALTON (Farthing, 2006), traduction de Luc CARISSIMO, Denoël collection Lunes d'Encre, 2015, 352 pages

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