Premier roman de Leo PERUTZ, La troisième balle se déroule au début du XVIème siècle, au début de la conquête de l'empire aztèque par Hernán Cortés, soit à la fin de l'année 1519, même si celle-ci n'est pas citée explicitement. Le roman est plus précisément consacré à un personnage imaginaire, Franz Grumbach, allemand luthérien de son état, qui tente de s'opposer à l'irrésistible conquête de l'espagnol. Pour cela il ne dispose que d'une arquebuse et de trois balles, dont l'ultime est destinée à Cortés lui-même. Mais l'Histoire ne peut être modifiée si facilement, ce qui n'est pas le cas du destin d'un homme isolé comme Grumbach.
Leo PERUTZ articule donc son roman autour d'une reconstitution historique et d'un destin imaginaire. En toile de fond il dépeint la querelle théologique entre luthériens et chrétiens, laquelle a réellement fait rage à l'époque de Charles Quint. Cela fait de La troisième balle un roman particulièrement dense, mâtiné de fantastique, dans la tradition des écrivains de langue allemande de l'époque (KAFKA, MEYRINCK...).
Si le résultat est convaincant d'un point de vue strictement littéraire, le lecteur pourra néanmoins regretter que PERUTZ ne parvienne pas à rendre ses personnages particulièrement attachants. Il est avant tout descriptif, et laisse de côté toute leur dimension humaine, en particulier celle de Franz Grumbach. Si cela ne fait pas de La troisième balle un mauvais roman pour autant, cela suffit pour ne pas le rendre impérissable.