Vie et mort d’Elric de Melniboné. Tel est le thème du cycle d’Elric de Michael MOORCOCK.
Il est inutile d’aller au-delà pour résumer cette oeuvre puisqu’Elric est un héros mythique dans le paysage de la Fantasy, et ce à plus d’un titre. Bien sûr il est mythique parce qu’il a dépassé aujourd’hui la soixantaine (il est né en 1955) et qu’il continue d’être abondamment lu (Omnibus a édité l’intégrale présentée ici en mai 2006). Il est également mythique parce qu’il s’agit d’un personnage pour le moins original dans un genre où les super-héros plus ou moins naïfs sont légions. Elric est en effet un albinos qui ne vit que grâce aux bienfaits de drogues puissantes et de son épée, Stormbringer, douée d’une vie propre. Elric est surtout éminemment torturé, plein de contradictions et peu sûr de lui tant les interrogations qui l’obsèdent trouvent difficilement une réponse.
La vie, la vérité, le rationnel, et leurs contraires bien sûr, sont quelques uns des thèmes qui hantent l’esprit d’Elric. Et lorsqu’un semblant de réponse semble naître, c’est oublier un peu vite que son univers est multiple et que les Dieux eux-mêmes semblent jouer avec les hommes sans aucune raison bien précise. Le personnage d’Elric est par ailleurs servi par une écriture nerveuse qui lui sied parfaitement et le rend réellement humain. Il faut dire que Michael MOORCOCK avait pour habitude d’affirmer dans les années 60 qu’Elric "c’était lui".
Tout cela donne donc au personnage une puissance dramatique rarement égalée.
Quant à la structure du cycle, elle est pour le moins complexe et peut dérouter le néophyte. Voici donc quelques explications.
L’édition OMNIBUS propose l’ordre de lecture suivant :
- Elric des Dragons (Elric of Melniboné, 1972, traduction de Daphné HALIN)
- La forteresse de la perle (The Fortress of the Pearl, 1989, traduction de Gérard LEBEC)
- Le Navigateur sur les mers du destin (The Sailor on the Seas of Fate, 1976, traduction de George W. BARLOW)
- Elric le nécromancien (The Weird of the White Wolf, 1977, traduction de Michel DEMUTH et Frantz STRASCHITZ)
- La sorcière dormante (The Sleeping Sorceress, 1977, traduction de Michel DEMUTH)
- La Revanche de la Rose (The Revenge of the Rose, 1991, traduction de E.C.L. MEISTERMANN)
- L’Épée noire (The Bane of the Black Sword, 1977, traduction de Frantz STRASCHITZ)
- Le dernier enchantement (The Last Enchantment, 1978, traduction de E.C.L. MEISTERMANN)
- Stormbringer (Stormbringer, 1977, traduction de Frantz STRASCHITZ)
- Elric à la fin des temps (Elric at the End of Time, 1984, traduction de E.C.L. MEISTERMANN)
Cet ordre correspond à la chronologie de l’intrigue. Néanmoins d’autres ordres de lecture sont possibles tant la publication des aventures d’Elric fut décousue, et inégale en qualité.
Le coeur du cycle est composé de quatre recueils de nouvelles (Elric le Nécromancien, La sorcière dormante, L’épée noire et Stormbringer). Elles ont été écrites à partir du milieu des années 50 jusqu’en 1965. Elles ont toutefois été regroupées en volumes plus tardivement, et ce de manière parfaitement appropriée puisque l’on peut avoir l’impression qu’elles constituent bel et bien un tout à leur lecture. Ces quatre volumes sont les meilleurs, Stormbringer étant tout simplement un chef d’oeuvre. Ils se suffisent d’ailleurs à eux-mêmes.
En réponse au succès public du cycle original, Michael MOORCOCK publie deux autres volumes dans les années 70 : Elric des dragons (1972) et Le navigateur sur les mers du destin (1976). Le premier est un roman, le second un recueil de trois nouvelles, les deux étant consacrés à la jeunesse d’Elric. Même si ces ajouts n’ont pas la force des quatre premiers volumes, et n’apportent que peu d’éléments à l’intrigue, le cycle d’Elric comporte alors 6 volumes présentés souvent comme l’édition définitive (Pocket publie les six volumes sous coffret à la fin des années 80).
Mais Michael MOORCOCK publie un troisième tome dédié à la jeunesse d’Elric en 1989 (La forteresse de la perle), qui s’insère chronologiquement entre les deux premiers. Un autre roman est publié en 1991 (La revanche de la Rose), celui-ci se caractérisant par une intrigue confuse qui en fait ce qu’il y a de moins bon dans le cycle.
Il existe enfin deux nouvelles annexes : Le dernier enchantement et Elric à la fin des temps. La première nouvelle, écrite en 1962, mais publiée 16 ans plus tard, est sans intérêt (d’où probablement le délai nécessaire à sa publication). La seconde, publiée en 1984, propose un regard neuf de Michael MOORCOCK sur le personnage qu’il a créé vingt ans plus tôt. C’est intellectuellement intéressant, mais n’apporte rien au cycle lui-même.
Tous ces romans et nouvelles sont donc placés dans l’ordre chronologique de l’intrigue par OMNIBUS, ce qui facilite les choix du lecteur potentiel. Néanmoins celui-ci, s’il est pressé, ou s’il ne veut que le meilleur, peut se contenter des volumes 4, 5, 7 et 9 pour parfaitement appréhender le personnage d’Elric. A eux quatre, ils constituent un incontournable de la Fantasy que tout amateur du genre se doit d’avoir lu. Ils pourraient d’ailleurs bien lui donner envie de lire les textes tardifs, en dépit de leurs faiblesses.